Qu’est-ce
qui est le plus puissant : la réalité ou notre perception de la
réalité ? Je vais vous dévoiler la réponse, la conclusion du sermon avant même
que je ne l’aie commencé : à mon avis, c’est notre perception de la
réalité.
Permettez-moi
une illustration bien concrète, très actuelle. Quand, à l’arrêt de l’Amondolier,
nous attendons le tram pendant 5 minutes, c’est tout à fait différent
que si nous l’attendons pendant 5 minutes à Rive ou au Molard ou à Bel-Air.
Pourquoi ?
Simplement
parce qu’à ces trois arrêts, par exemple, il a y un appareil électronique qui affiche
exactement en temps réel le temps d’attente avant l’arrivée du prochain tram. Et
ici, à l’Amandolier ? Rien. Il n’y pas cet appareil électronique.
Et ce n’est
pas seulement la perception des Genevois avec leurs TPG. En effet, des
recherches menées par d’autres sociétés de transports publics pour augmenter la
satisfaction de leurs clients ont révélé que, quand il y avait ce type
d’affichage
électronique
du temps d’attente, la satisfaction des usagers était supérieure. Cinq minutes
ne sont pas donc toujours cinq minutes. Ce sont nos perceptions qui créent la
réalité.
Cet axiome
existe aussi clairement dans la Torah. En effet, dans la parachah « Shelakh Lekhah»
nous découvrons l’histoire des 12 espions envoyés par Moïse pour explorer le
pays de Canaan. En lisant cette parachah, il est important de souvenir que tous
les espions ont vu exactement la même réalité. Il est écrit :
(Nombres
13 : 17-20)
« Moïse
les envoya donc pour explorer le pays de Canaan, et il leur dit: Montez ici par
le Midi, et vous monterez sur la montagne, Et vous verrez le pays, comment il
est, et le peuple qui y habite, s'il est fort ou faible, s'il est en petit ou
en grand nombre; Et le pays où ce peuple habite, s'il est bon ou mauvais ; comment
sont les villes dans lesquelles il habite, si ce sont de simples villages ou
des forteresses; comment est la terre, si elle est grasse ou maigre; s'il y a
des arbres ou non. Et ayez du courage, et rapportez des fruits de ce pays.
C'était alors la saison des premiers raisins. »
Les
espions ont fait exactement comme le commandait Moise, mais les perceptions
entre les espions étaient différentes. Il est écrit en effet:
(Nombres
13 :26-28)
« Ils
se présentèrent devant Moïse et Aaron, ainsi que devant toute la communauté, et
leur montrèrent les fruits du pays. Ils firent donc leur rapport à Moïse, et racontèrent
: Nous sommes allés dans le pays où tu nous avais envoyés; et vraiment c'est un
pays où ruissellent le lait et le miel, et voici de ses fruits. Cependant le
peuple qui habite dans ce pays est robuste, et les villes sont fortifiées et
très grandes. »
Ensuite, ils ont énuméré les peuples de Canaan qu’ils
avaient vus, mais il faut souligner que jusqu’ici, nous n’avions pas entendu de
perceptions négatives, juste un rapport assez objectif. Mais, directement après,
il est écrit :
« Alors
Caleb – un des espions - fit taire le peuple devant Moïse, et dit : « Montons-y,
et emparons-nous-en ; car nous pouvons les vaincre. »
Mais les
hommes qui étaient partis avec lui, dirent: « Nous ne pourrons pas marcher
contre ce peuple, car il est plus fort que nous. »
Et, devant
les enfants d'Israël, ils décrièrent le
pays qu'ils avaient exploré, en disant:
« Le pays
que nous avons parcouru, est un pays qui dévore ses habitants, et tous ceux que
nous y avons vus, sont des gens de haute stature. Et nous y avons vu les
géants, enfants d'Anak, de la race des géants; et nous étions à nos propres yeux
comme des sauterelles, et nous l'étions aussi à leurs yeux. »
Quand je
travaillais dans le domaine du marketing, nous disions
toujours : « Lorsqu’un client fait une expérience positive, il
va le dire à 3 personnes. Lorsqu’un client fait une expérience négative, il va
le dire à 10 personnes. » Selon la recherche en marketing, la différence
entre une expérience positive et une expérience négative porte donc rarement sur
la qualité objective d’un produit, mais plutôt sur l’enthousiasme du vendeur et
sur la chaleur de l’accueil reçu par le client.
Cette
question de perception est vraiment importante car nos perceptions ne sont pas isolées.
Nous influons inévitablement sur notre entourage avec nos perceptions car souvent,
nous pensons qu’elles sont la réalité, et même la seule réalité. Alors qu’en
fait, elles peuvent ou encourager les autres ou, au contraire, les décourager.
Donc il
n’y avait pas de géants en Canaan. Les autres espions l’ont dit parce qu’ils craignaient
pour leur sécurité, parce qu’ils avaient peur. Mais quel en a été le
résultat ?
Il est
écrit : (Nombres 14 :1-4)
« Alors
toute l'assemblée éleva la voix, et se mit à pousser des cris, et le peuple passa
cette nuit-là à pleurer. Et tous les enfants d'Israël murmurèrent contre Moïse
et contre Aaron, et toute l'assemblée leur dit: « Que ne sommes-nous morts dans le pays d'Égypte ou dans ce désert!
Que ne sommes-nous morts ! Et pourquoi l'Éternel nous conduit-il vers ce pays, si
c’est pour y tomber par l'épée? Nos femmes et nos jeunes enfants y seront une
proie facile. Ne vaudrait-il pas mieux, pour nous, de retourner en Égypte? »
Souvent la
leçon dans la Torah n’est pas aussi claire, mais ici, je pense que le principal
message est évident. Suite à cette réaction, les Fils d’Israël ont dû rester 40
ans dans le désert. Oui 40 ans ! Mais pourquoi ? C’était bien sûr une
punition, mais je pense plutôt que, malheureusement, c’était simplement
nécessaire.
Pour tout
le monde c’est souvent plus simple de rester dans le désert plutôt que de
lutter ou de risquer de tout perdre simplement pour la promesse d’un pays de lait
et de miel, c’est à dire, pour la promesse de dos vrais rêves. Pourtant, 40 ans
plus tard, les descendants de cette génération l’ont réussi. Il n’était donc
pas impossible de conquérir ce pays et, finalement, il n’y avait pas le moindre
géant là-bas. Mais ces 40 ans ont été nécessaires car la perception était devenue
plus forte que la réalité ; ces perceptions qui existaient au cause de la
peur étaient devenues la réalité elle-même. Il faudrait donc attendre 40 ans
pour que les personnes puissent concevoir une autre réalité.
Caleb et
les autres espions auraient pu opter pour une autre solution. Elle aurait été plus
difficile ( en effet, pour n’importe qui, elle serait plus difficile ) mais la
génération qui avait vu tous les miracles après l’exode aurait pu utiliser son énergie
positive et choisir ses perceptions positives pour encourager la communauté au
lieu de la décourager.
Mais quand
on est vraiment coincés dans ses propres perceptions, quand on en vient à
confondre notre perception de réalité avec la réalité elle-même, sans question
et sans exception, notre « réalité » devient réalité : nous
pensons et agissons comme les compagnons de Caleb :
« Je
ne peux pas. Il y a des géants là et je suis comme une sauterelle. » Mais
ce n’est qu’une perception, et ce n’est pas la réalité elle-même. Nous
possédons la puissance de notre créativité, nos familles, notre religion, nos
traditions, nos communautés. A travers toutes ces éléments-là, nous avons le
choix de percevoir autre chose, quelque chose totalement différent de la peur.
La
question n’est pas « qu’est-ce que notre réalité », la question à se
poser est « quelle est la réalité que nous désirons », et même
« quelles sont les perceptions que nous sommes prêts à sacrifier pour surmonter
notre peur et réaliser nos vrais rêves ? »